18/09/2012

"Cherchez Hortense" : Bacri au sommet dans une comédie sophistiquée et réjouissante

Cherchez Hortense : 4 / 5

Après le retour très agréable d'Agnès Jaoui actrice dans Du vent dans mes mollets, c'est au tour de l'homme du couple de dramaturges - scénaristes à succès des années 90 d'être à l'honneur dans Cherchez Hortense. Mais malgré le plaisir de retrouver un acteur à la personnalité aussi marquée que Jean-Pierre Bacri, l'argument du film de Pascal Bonitzer est loin d'être alléchant : soit les déboires d'un énième quinquagénaire « bobo » indécis. La première scène, avec Kristin Scott Thomas en metteur en scène de théâtre, fait craindre un cinéma intellectuel parisien un peu snob. Fort heureusement ces premières réserves sont vite balayées, alors que se dévoile une comédie intelligente et ludique.


Avec Cherchez Hortense, Bonitzer choisit une dimension sociale prononcée inédite jusque-là dans son cinéma. Damien Hauer (Bacri), pressé par sa femme (Scott Thomas), doit demander à un père conseiller d'état intimidant (Claude Rich, magistral) d'intercéder pour une sans-papier serbe afin de régulariser sa situation. Cet enjeu dramatique fort posé, le film n'a de cesse de prendre des détours liés à autant de personnages qui peuplent le quotidien de Damien, de son fils adolescent à une femme qui semble en difficulté (Isabelle Carré) en passant par un collègue dépressif (Jackie Berroyer). Damien ne sait plus où donner de la tête, et la façon dont il se débat avec ses problèmes ordinaires revêt bientôt un caractère comique pour le plus grand plaisir du spectateur. 
 
Souvent surprenant, Cherchez Hortense joue de décalages efficaces, tel qu'un beau-frère et sa compagne invités mais un peu envahissants, un chauffeur de taxi inexpérimenté ou un passage secret emprunté pour une discussion privée. Le tout culmine dans le jeu de l'intrigue autour d'un serveur de restaurant japonais au ton doucereux dans des scènes hilarantes. L'humour qui s'y déploie trouve sa force dans les non-dits, alors que Damien les comble avec son imagination angoissée et se livre au même exercice que le spectateur tout au long du métrage. Le titre du film s'offre en fait comme une énigme à déchiffrer, le scénariste-réalisateur multipliant les zones d'ombre (des fondus au noir sont régulièrement utilisés) afin de mieux jouer avec notre compréhension et nos attentes, de nous manipuler par le biais de la mise en scène ou de la rétention d'information. C'est tout à l'honneur de Bonitzer de nous offrir un jeu de pistes passionnant où l'ambiguïté des scènes et des motivations des protagonistes laisse une place d'interprète actif au spectateur. 

 
Au-delà de cette lecture au second degré de la construction ludique de Cherchez Hortense, il faut saluer la performance extraordinaire de Jean-Pierre Bacri, qui donne le poids émotionnel nécessaire au film. L'acteur trouve avec Damien Hauer son rôle le plus riche et le plus touchant depuis le Castella du Goût des autres. Le film lui offre un nouvel espace de jeu enthousiasmant, qu'il s'agisse d'une scène d'ébriété burlesque ou d'un dénouement où sa fièvre émotionnelle contenue s'exprime enfin. Si Damien est en quête du concept particulier à la culture chinoise de « ce qui convient », Bonitzer et Bacri l'ont tous deux trouvé avec cette comédie euphorisante.

En bref : à voir absolument

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