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I love you Philip Morris, premier film réussi de Glenn Ficarra et John Requa, parvenait à rendre crédible le couple homosexuel incarné par Jim Carrey et Ewan McGregor dans un mélange réussi de comédie romantique et drame, inspiré d’une histoire vraie. Avec Crazy, Stupid, Love, les réalisateurs / scénaristes livrent un autre film aux frontières de la comédie et du drame qui explore le sentiment amoureux, mais cette fois-ci à la plus grande échelle de la forme chorale. Ils sont aidés dans leur tâche par une pléiade d’acteurs talentueux qui ont fait leurs preuves dans un des deux genres auxquels le film tente d’appartenir : Steve Carrell, Julianne Moore, Ryan Gosling… Les ingrédients semblent réunis pour faire de Crazy, Stupid, Love une nouvelle réussite de la comédie US.
Hélas, force est de constater que le bilan est mitigé, le film oscillant entre une certaine originalité dans les situations et des clichés agaçants. L’ouverture du film laisse pourtant présager du meilleur : alors qu’il ne s’y attend pas, Cal (Steve Carrell) se retrouve face au fait accompli de son divorce décidé par sa femme, Emily (Julianne Moore). Bonne idée de mise en scène, la distance qui sépare le couple victime de la routine est symbolisée par leurs pieds immobiles aux bouts opposés de leur table, en contraste avec le ballet de pieds des autres couples. La réaction de Cal, apathique jusqu’à ce qu’il saute de la voiture en marche lorsque sa femme avoue qu’elle l’a trompé, appelle l’empathie immédiate du spectateur tout en lorgnant vers le burlesque. Le même mélange d’humour et gravité se retrouve dans l’intrigue entre le fils du couple, Robbie, et sa baby-sitter, cette dernière le surprenant en train de se masturber avant qu’il lui annonce qu’il pensait à elle en le faisant et qu’il l’aime. C’est dans le malaise comique que produit de telles situations que le film est le plus fort ; dans la franchise désarmante de Robbie qui rehausse son siège pour dominer physiquement l’amant de sa mère ou le désespoir qui pointe dans les tentatives de séduction de Cal. De même, la relation du père de famille avec son coach en séduction (Ryan Gosling) livre des moments savoureux, l’alchimie comique entre les deux comédiens étant palpable. Malheureusement, lorsqu’il se veut sincère, le film sonne faux, notamment dans son discours rebattu sur les âmes sœurs.
L’impression de comédie mécanique ressentie devant Crazy, Stupid, Love tient en grande partie dans son traitement des personnages féminins. Car les hommes ont, il faut bien le reconnaître, bénéficié d’un traitement de faveur évident dans l’intrigue. Ainsi, si Cal inspire la sympathie, son amour inconditionnel pour Emily reste incompréhensible car la pauvre Julianne Moore se retrouve dans la position de la femme infidèle sans avoir beaucoup à défendre. Emma Stone, dans le rôle de la fille un peu naïve qui attend une proposition de mariage de son compagnon peu charismatique, s’en sort un peu mieux sans que son personnage soit complètement convaincant. Le manque de considération des femmes dans le film est d’ailleurs curieusement résumé par un plan séquence : on assiste à un ballet de filles faciles interchangeables, séduites l’une après l’autre par Cal. Le personnage de Marisa Tomei, professeur à la limite de l’hystérie aussi bien dans ses ébats avec Cal que dans sa colère suite au fait qu’il l’ignore, achève de présenter des femmes une image caricaturale peu reluisante. Au vu du rôle de premier plan convaincant de Kristen Wiig dans Mes meilleures amies, on est tout de même en droit d’attendre mieux des comédies américaines quant à leur traitement de la gente féminine.
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