03/03/2014

Her : une petite bluette futuriste

3 / 5

Spike Jonze s’est fait connaître dans les années 90 en réalisant des clips musicaux, notamment celui mémorable de Da Funk où un chien anthropomorphe déambulait dans New York. A la fin des années 90 et début des années 2000, il a ensuite porté à l’écran les scénarios de Charlie Kaufman, auteur de scripts à concept tels que Dans la peau de John Malkovich ou Eternal Sunshine of a Spotless Mind . Her se situe dans la même mouvance, en imaginant une histoire d’amour entre un homme et un système d’exploitation. Ce concept original a permis à Spike Jonze de remporter les honneurs du Golden Globe et de l’Oscar du meilleur scénario, mais le film n’est hélas pas vraiment à la hauteur de son concept.


La première partie de Her explore un univers futuriste intéressant, en prise avec le monde moderne et l’évolution des rapports sociaux. Theodore Twombly (Joaquin Phoenix), auteur de lettres intimes qu’il rédige pour des clients, mène une vie solitaire suite à sa rupture avec son ex-femme. Entre jeux vidéo et discussions anonymes avec les membres de sites de rencontre, les échecs des tentatives du protagoniste pour tromper sa misère affective installent une ambiance de comédie de science-fiction attachante, à la fois familière et dépaysante. Si le charme opère encore dans le début de la relation insolite entre Theodore et Samantha, un système d’exploitation à l’intelligence artificielle très développée (avec la voix de Scarlett Johansson), la limite du film est bien celle de cette « love story » centrale.

L’univers construit dans Her  a beau être séduisant, l’ennui finit par prendre le dessus face à une histoire qui sort finalement assez peu des sentiers battus. Certes les décalages causés par la nature de Samantha relancent l’intérêt par moment, mais le film tombe dans le clichés de la comédie romantique indépendante : journée sur la plage immortalisé par un morceau de musique mélancolique, tentatives de poésie et bonheur résumé à un rire partagé (dont j’ai perdu le compte du nombre d’occurrences). Tout ça pour aboutir à une morale douce amère déjà entendue mille fois.  Tout cela est mignon, mais très lisse, à l’image de la bande-son du film et de son visuel léché. On aurait aimé que le que  la relation entre Theodore et Samantha, création virtuelle, soit explorée dans tout ce qu’elle pouvait avoir d’ambigu : la scène avec le substitut physique de Samantha provoque un véritable trouble, mais se retrouve un îlot dans un océan d'une grande platitude.


Surtout, le métrage peine à tirer parti de la richesse de l’univers qui nous est présenté dans son introduction. Plutôt qu’une histoire intime unique étirée sur deux heures, on aurait préféré voir développées les différentes relations entre utilisateurs et systèmes d’exploitation évoquées au détour d’une conversation entre Theodore et sa confidente (Amy Adams). Il y avait là un grand film stimulant, tandis que Her reste une toute petite œuvre, certes pas désagréable mais lassante sur la longueur.

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