03/04/2012

Les pirates ! Bons à rien, mauvais en tout : les joies de l'animation artisanale

Les Pirates ! Bons à rien, mauvais en tout : 4 / 5

Nous sommes à la moitié du XIXème siècle. Après une victoire sur les plus puissantes flottes mondiales, dont le Liechtenstein, l'empire britannique et à sa tête la reine Victoria occupe tout l'espace maritime. Tout l'espace maritime ? Non, car une poignée de navigateurs résiste encore et toujours à l'envahisseur des mers... les pirates ! Avec cette scène d'introduction à la Astérix où une reine Victoria hurle sa haine pour les pirates, les studios Aardman annoncent le ton joyeusement débridé de leur nouvelle production où l'humour au premier degré côtoie le jeu avec l'histoire et les références culturelles anachroniques, comme dans le chef d’œuvre de Goscinny et Uderzo : un ressort principal de l'intrigue est ainsi un concours du pirate de l'année modelé sur les Grammy Awards et consorts.


Mais les résistants, ce sont surtout les irréductibles animateurs de Aardman qui après leur passage mitigé par l'animation numérique retrouvent une foi inébranlable dans la technique artisanale qui ont fait leur heure de gloire, le 'stop motion' en pâte à modeler. D'où vient l'émerveillement, l'impression de beauté de tous les instants ressentie devant ces Pirates ! Bons à rien, mauvais en tout  ? Ils tiennent à un travail d'orfèvre minutieux, à une richesse des surfaces et des textures, mais surtout au plaisir de grand enfant de voir s'animer des figurines à l'expressivité renversante. L'enthousiasme vient aussi d'un récit, adapté de livres pour enfants, qui a la frénésie des aventures que l'on rêvait gosses avec en plus l'inventivité nécessaire à nos exigences d'adultes : ici, les pirates d'habitude associés aux paysages exotiques se retrouvent dans le cadre atypique du Londres victorien suite à une rencontre surprenante. Le dernier atout irrésistible de Pirates !  est une brochette de personnages haut en couleur et attachants, desquels se détachent une mascotte "perroquet" adorable et un singe savant muet qui s'exprime avec des cartons.


Malgré toutes ces qualités, le film de Peter Lord ne parvient cependant pas à retrouver totalement la jubilation que pouvait produire Wallace et Gromit : le mystère du lapin-garou sorti en 2005. La réussite insurpassée du film de Nick Park et Steve Box tient certes au personnage de Gromit, indétrônable acteur muet dont les émotions passent par de simples regards et mouvements de sourcil minimalistes, mais pas seulement. La supériorité de Wallace et Gromit dans l'euphorie est celle d'un récit fluide où les effets comiques sont intégrés parfaitement alors que Pirates ! les aligne un peu arbitrairement. L'intrigue du film est en effet ponctuée de gags parfois savoureux mais qui sont souvent des parenthèses narratives, un fonctionnement illustré au début du film par la revue loufoque de tous les membres de l'équipage pirate un peu sous-utilisés ensuite, ou plus tard par les échecs consécutifs rencontrés dans la recherche d'un butin. Si ces quelques ficelles un peu grosses ne retirent rien aux trouvailles de Pirates !, ce dernier est alors relégué au statut de très bon divertissement là où Wallace et Gromit atteignait la dimension de chef d’œuvre instantané. 

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