05/06/2015

Mad Max - Fury Road : Furiosa reine du désert

3,5 / 5

Cela faisait trente ans qu’on n’avait pas a eu de nouvelles de Max Rockatansky. Et nos retrouvailles avec lui ne se déroulent pas vraiment à son avantage. La voix off a beau nous placer à ses côtés, le héros semble au bout du rouleau, portant la barbe longue et souffrant d’hallucinations. Champion des opprimés de son futur post-apocalyptique, le héros joue d’abord le rôle de la victime. Certes ce n’est pas neuf, Max se faisait déjà piéger au début du deuxième et troisième volet de la série. Mais ici le consat est sans détours : il se fait courser par une bande agressive puis, une fois son bolide iconique crashé, se fait tabasser et capturer. Un démarrage donc peu glorieux pour Max mais il va sûrement se venger, non ? C’est tout de même le héros éponyme de sa saga.


Sauf que non. En clair, si vous vous attendez à un retour en force d’un héros burné des années 80, passez votre chemin. Non pas que Tom Hardy démérite dans la reprise du flambeau de Mel Gibson, mais il est agent plus que moteur de l’intrigue. D’ailleurs si l’on exclut le premier opus ce schéma narratif est fidèle au reste de la saga. Le solitaire Max se retrouve à chaque fois impliqué malgré lui dans une intrigue avant de se rallier à une cause.  Au centre de Mad Max : Fury Road on trouve donc plutôt la charismatique Imperator Furiosa, campée par une Charlize Theron au crâne rasé et bras bionique. Ce look aux antipodes de son image glamour habituelle sert un récit aux accents féministes assumés et bienvenus dans le cinéma d’action où les femmes font souvent figures de potiches. Au-delà de sa magnifique héroïne, Fury Road dénonce en effet au travers de son intrigue les dérives du pouvoir et du patriarcat. Par l’intermédiaire de la science-fiction, George Miller et ses scénaristes posent la question de la place des femmes dans la société  et proposent de véritables pistes de réflexion.



Le progressisme de Mad Max : Fury Road emporte l’adhésion, mais c’est avant tout l’action qui prime. Et de ce point de vue, les amateurs seront servis avec des scènes aux chorégraphies dantesques. Il convient de louer la présence importante dans le film de cascades réalisées sans effets numériques qui apportent un effet de réel et d’immersion souvent absent des films d’action contemporains, des Transformers aux films de super-héros. Le tournage en décors naturels et la superbe photographie de John Seale sont deux autres composantes majeures d’une esthétique impeccable.



Film maîtrisé de bout en bout, admirable dans sa mise en scène, Mad Max : Fury Road n’en est cependant pas pour autant un grand film. Son parti pris de film d’action pur, course poursuite quasi discontinue de deux heures, est aussi bien un avantage qu’un défaut. On est certes embarqués dans une aventure qu’on ne voit pas passer mais on n’en retient hélas pas grand-chose et une fois l’expérience de cinéma passée on n’a pas forcément envie d’y revenir. Le film fonctionne en surrégime constant dans les scènes d’action sans gradation à l’échelle du film dans l’ampleur ni le spectaculaire. Une des scènes les plus impressionnantes de Mad Max : Fury Road, celle de la tempête teasée dans la bande-annonce, se situe  ainsi dans sa première moitié sans que rien ne vienne ensuite lui faire ombrage. Malgré les bolides qui fusent à cent à l’heure on ressent donc paradoxalement une légère impression de statisme. Le film renouvelle en fait assez peu ses enjeux, et si on y regarde de près se contente de recycler les éléments des précédents films de la saga.




Mais le plus gros défaut du film reste ses antagonistes sous-développés. On comprend que George Miller et ses co-auteurs privilégient les protagonistes qui bénéficient d’un meilleur traitement, mais la bande de méchants semble susciter par leurs looks délurés une série de promesses non réalisées. Immortan Joe est caricatural et ses sbires sont inexistants. Ils suivent ainsi la tradition des antagonistes sous-exploités de la saga “Mad Max”, auxquels seuls l’Entity du Dôme du tonnerre échappe un peu. Cette troupe de gueules sorties tout droit de chez Leone ou Fellini n’est qu’une surface, intriguante vue de loin mais sans aucune profondeur. Faire emmener cette troupe par des tambours et un guitariste dont l’instrument crache du feu fait sa petite impression, mais ce n’est au final qu’une pyrotechnie cache-misère.