22/12/2014
21/12/2014
Le Hobbit - la bataille des Cinq Armées : un final spectaculaire et émouvant
4 /5
Avec ce 3ème et
dernier volet du Hobbit vient le
temps du bilan et de la comparaison inévitable avec la trilogie du Seigneur des Anneaux. Et disons le
d’emblée, cette nouvelle trilogie se sera un peu déroulée dans l’ombre de sa
prestigieuse grande sœur. Cette impression était à prévoir étant donné le
statut de « prequel » que prend Le
Hobbit par rapport au Seigneur des
Anneaux. Conscient de cette situation, Peter Jackson avait préféré laisser
la réalisation de ce projet à d’autres avant de se trouver obligé de la
reprendre suite au désistement de Guillermo del Toro. Le résultat paradoxal de
cette tâche acceptée à contre-cœur a été la transformation d’une adpatation en
deux films du roman somme toute assez court de J.R.R. Tolkien en trilogie.
Au-delà d’une sensation de
contenu étiré, le plus gros problème de ce découpage en trois films tient à une
structure narrative bancale. Ce problème n’aura jamais été autant ressenti que
dans l’ouverture de ce dernier volet où la victoire sur Smaug, antagoniste
proncipal depuis le tout début de l’aventure, se fait en l’espace d’une
introduction certes spectaculaire mais un peu sommaire. On aurait pu aisément
imaginer un dyptique qui aurait placé la confrontation de Bilbo et des nains
avec le dragon en début de deuxième film. Cette résolution expéditive a
néammoins un avantage, celui de recentrer l’intrigue sur le destin de Thorin,
figure centrale de cet opus final.
L’obsession de Thorin pour
l’Arkenstone évoque évidemment le ressort dramatique principal du Seigneur des Anneaux. Passé cet aspect
redite, le personnage y gagne en ambiguité et en intérêt : la fragilité de
ce héros torturé nous le rend plus proche sans rien enlever de la fascination
qu’il peut exercer. Richard Armitage se révèle un choix judicieux, la présence
remarquable de l’acteur lui permettant d’incarner aussi bien les accès de folie
et les troubles de Thorin que son charisme royal. Martin Freeman reste quant à lui un des atouts maîtres du Hobbit, idéal en témoin ordinaire de
conflits historiques et extraordinaires auquel chacun pourra s'identifier.
Là où Le Seigneur des Anneaux était une fresque épique, La Bataille des 5 Armées reprend l’axe
plus intime d’Un Voyage Inattendu.
Dans cette prespective, l’ajout du personnage de l’elfe Tauriel est on ne peut
plus juste : le triangle amoureux dans lequel elle se retrouve, entre son
pair Legolas et le nain Kili auquel tout l’oppose, accroit l’investissement
émotionnel du spectateur dans la complexe bataille qui occupe la moitié du film.
Peter Jackson s’en donne alors à cœur joie, faisant preuve d’une générosité qui
ravira ou fatiguera, au choix. Si ces séquences d’action sont moins mémorables
que celles titanesques du Seigneur des Anneaux, les enjeux
individuels y sont finalement plus forts. L’issue élégiaque du récit fera alors
certainement couler quelques larmes.
Plus intense et ramassé que ces
prédécesseurs, La Bataille des 5 Armées
conclut de façon très satisfaisante les aventures de Bilbo. Que dire de
l’ensemble du Hobbit au final ? Le tout n’était pas aussi abouti que la
première trilogie de Peter Jackson, et ne bénéficiait pas du caractère innovant
de cette première entreprise. Cependant le cinéaste et son équipe (décorateurs,
costumiers, responsables des effets spéciaux…) ont su nous prouver qu’ils
savaient toujours parler à notre imagination, nous embarquant dans une épopée
qui malgré ses longueurs nous aura offert quantité de moments de véritable
magie. Ce savoir-faire, que l’on tient pour acquis et ordinaire depuis le Seigneur des Anneaux, n’en reste pas
moins exceptionnel.
19/12/2014
Whiplash : un film percutant mené tambour battant
4 / 5
Présenté entre autres aux
festivals de Sundance et Deauville, Whiplash a convaincu aussi bien les
jurys du festival qui lui ont décerné leur Grand prix que ses spectateurs qui
l’ont couronné de prix du public. Le film du jeune Damien Chazelle, pas encore
trentenaire, s’impose de fait comme un évidence ; il nous entraîne par son
rythme soutenu qui le distingue du reste d’une production indépendante
américaine souvent plus encline à la contemplation. Ce sens du timing n’est pas
surprenant chez un cinéaste ancien batteur de jazz. Son premier long métrage
resté inédit en France, Guy and Madeline on a Park bench, avait
évidemment à voir avec la musique en opérant un croisement entre l’esthétique
de John Cassavetes et les « musicals » de Vincente Minelli ou les
films de Jacques Demy. Avec Whiplash Chazelle passe de cette déclaration
d’amour à la musique à un contenu plus réaliste et dramatique, aux accents
autobiographiques.
Genre complexe et se
nourrissant de virtuosité, le jazz relève de la musique dans toute sa splendeur
mature et exerce un pouvoir de fascination auquel Chazelle a autrefois succombé.
Avec Whiplash le cinéaste nous dévoile la face cachée de la beauté de
cette musique, le travail fait de souffrance qui est à sa source.
« Success story » impossible, le film évoque à juste titre le fantôme
ambivalent de Charlie Parker, musicien génial mais aussi cocaïnomane
autodestructeur. Andrew (Miles Teller) est pris dans une logique d’ascencions
et chutes successives orchestrées aussi bien par un chef d’orchestre sadique (J.K.
Simmons) que liées à sa propre quête masochiste. Cette tension palpable fait
prendre au film des allures de thriller. L’aboutissement de ce versant du
métrage est une course contre la montre mise en scène avec une précision
hitchcockienne alors que Andrew en retard pour un concours de l’orchestre
risque de perdre sa place de batteur au profit de son remplaçant. Embarqué aux côtés du protagoniste, le
spectateur éprouve physiquement l’importance de chaque seconde, et l’issue de
la séquence n’en est que plus choquante.
Physique, voilà le terme
qui convient le mieux à la mise en scène de Damien Chazelle. Dès le premier
long plan qui découvre Andrew s’entraînant à la batterie sur un rythme
crescendo, le cinéaste présente la pratique de la musique comme une lutte
contre les limites du corps pour atteindre l’idéal du sublime. C’est une
affaire de vie ou de mort, de sueur suintant des cymbales ou de sang
dégoulinant sur les baguettes de percussion.
Ce récit sur les extrêmes
terrifiants de la passion poussée à son paroxysme trouve son point focal dans
un face-à-face entre deux personnages à la noirceur réjouissante. Le
charismatique J.K. Simmons excelle en chef d’orchestre tyrannique prêt à faire
subir toutes les tortures psychologiques à ses étudiants afin de faire éclore
un hypothétique génie du jazz. Mais c’est le nouveau venu Miles Teller qui
porte surtout le film, incarnant la
détermination obstinée d’Andrew avec toute l’intensité nécessaire. Chazelle a
l’intelligence de ne pas épargner ce protagoniste en le rendant antipathique,
suffisant avec un entourage qui reste insensible à sa quête existentielle,
allant jusqu’à la cruauté lors d’une rupture avec une fille qui pourrait être
un obstacle pour sa carrière. Andrew et son tortionnaire ne sont finalement pas
si éloignés l’un de l’autre, prêts à sacrifier une part de leur humanité pour
la beauté. Apothéose de leur bras de fer, la séquence musicale finale étirée
jusqu’à l’épuisement est d’une puissance cinématographique à couper le souffle.
02/12/2014
Le Domaine des Dieux : un hommage humble et réjouissant
3,5 / 5
Depuis la sortie de la première aventure
live d’ Astérix au cinéma Astérix et
Obéix contre César il y a 15 ans, notre héros national et ses compagnons
ont envahi nos grans écrans avec plus ou moins de bonheur. Le dernier opus
signé Laurent Tirard Astérix et Obélix :
au service de Sa Majesté était plutôt réussi mais c’est surtout Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre
qui a marqué les esprits. La rencontre orchestrée par Alain Chabat entre les
comiques de Canal + et l’univers de Gosciny et Uderzo avait produit quelques
répliques et scènes devenues cultes à juste titre. Tout en respectant le récit
de l’album dont il était tiré, le film faisait souffler un vent de renouveau
par l’intermédiaire d’un casting qui prenait plaisir à se réapproprier leurs
personnages. La présence d’Alexandre Astier aux commandes du Domaine des Dieux laissait présager
d’une réinvention similaire.
Malgré cette attente, plutôt que d’appliquer l’humour de sa
série Kaamelott aux aventures
d’Astérix, l’auteur /acteur fait le choix du retrait et de la fidélité. Les
afficionados de l’humour cynique d’Astier pourront alors être déçus de ne pas
retrouver sa patte. Le renouvellement et la mise au goût du jour s’opère en
fait du côté de l’esthétique, celle de l’animation numérique. Châpeauté par Louis
Clichy, animateur chez Pixar pour Wall-E
et Là-haut, Le Domaine des Dieux est une réussite technique incontestable,
d’une élégance et d’une fluidité qui n’ont rien à envier aux productions
Disney. Les héros de Gosciny et Uderzo y gagnent une nouvelle jeunesse
euphorisante.
L’enthousiasme que provoque Le Domaine des Dieux trouve sa source
dans un mélange idéal entre tradition et modernité. La tradition, on la trouve
du côté de Roger Carel dont la voix est liée à toutes les incarnatations
animées d’Astérix. Miracle, le temps semble avoir épargné ce timbre
reconnaissable entre tous, pour le plus grand plaisir des specateurs
nostalgiques des mythiques Douze travaux
d’Astérix. Le regeretté Pierre Tornade n’a hélas pas participé à l’aventure
mais Guillaume Briat prend admirablement sa suite. A la vue du casting
prestigieux des voix, allant d’Alexandre Astier à Florence Foresti en passant
par Elie Semoun et Alain Chabat, on aurait pu s’attendre à
une répparopriation pareille à celle de Mission
Cléopâtre. Discrets et souvent méconnaissables, les acteurs s’effacent au
contraire derrière les personnages animés, se mettent humblement au service de
l’œuvre de Gosciny et Uderzo.
Pour autant, le film n’est pas une simple adaptation à la lettre de l’album d’Astérix dont il est issu. En modifiant de façon prononcée le dernier acte, Alexandre Astier montre qu’il est le digne héritier de Gosciny, capable d’ajouter des rebondissements sans trahir l’œuvre d’origine. Le final spectaculaire, à la chorégraphie éblouissante, apporte une touche de modernité réjouissante. Spectacle familial, Le Domaine des Dieux ravira les enfants mais agira surtout pour les amateurs plus âgés des aventures des Gaulois moustachus comme un bain de jouvence.
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