3,5 / 5
Cela faisait trente ans qu’on
n’avait pas a eu de nouvelles de Max Rockatansky. Et nos retrouvailles avec lui
ne se déroulent pas vraiment à son avantage. La voix off a beau nous placer à
ses côtés, le héros semble au bout du rouleau, portant la barbe longue et
souffrant d’hallucinations. Champion des opprimés de son futur
post-apocalyptique, le héros joue d’abord le rôle de la victime. Certes ce
n’est pas neuf, Max se faisait déjà piéger au début du deuxième et troisième
volet de la série. Mais ici le consat est sans détours : il se fait courser par
une bande agressive puis, une fois son bolide iconique crashé, se fait tabasser
et capturer. Un démarrage donc peu glorieux pour Max mais il va sûrement se
venger, non ? C’est tout de même le héros éponyme de sa saga.
Sauf que non. En clair, si vous vous
attendez à un retour en force d’un héros burné des années 80, passez votre
chemin. Non pas que Tom Hardy démérite dans la reprise du flambeau de Mel
Gibson, mais il est agent plus que moteur de l’intrigue. D’ailleurs si l’on
exclut le premier opus ce schéma narratif est fidèle au reste de la saga. Le
solitaire Max se retrouve à chaque fois impliqué malgré lui dans une intrigue
avant de se rallier à une cause. Au
centre de Mad Max : Fury Road on
trouve donc plutôt la charismatique Imperator Furiosa, campée par une Charlize
Theron au crâne rasé et bras bionique. Ce look aux antipodes de son image
glamour habituelle sert un récit aux accents féministes assumés et bienvenus
dans le cinéma d’action où les femmes font souvent figures de potiches. Au-delà
de sa magnifique héroïne, Fury Road
dénonce en effet au travers de son intrigue les dérives du pouvoir et du
patriarcat. Par l’intermédiaire de la science-fiction, George Miller et ses
scénaristes posent la question de la place des femmes dans la société et proposent de véritables pistes de
réflexion.
Le progressisme de Mad Max : Fury Road emporte l’adhésion,
mais c’est avant tout l’action qui prime. Et de ce point de vue, les amateurs
seront servis avec des scènes aux chorégraphies dantesques. Il convient de
louer la présence importante dans le film de cascades réalisées sans effets
numériques qui apportent un effet de réel et d’immersion souvent absent des
films d’action contemporains, des Transformers
aux films de super-héros. Le tournage en décors naturels et la superbe
photographie de John Seale sont deux autres composantes majeures d’une
esthétique impeccable.
Film maîtrisé de bout en bout,
admirable dans sa mise en scène, Mad Max
: Fury Road n’en est cependant pas pour autant un grand film. Son parti
pris de film d’action pur, course poursuite quasi discontinue de deux heures,
est aussi bien un avantage qu’un défaut. On est certes embarqués dans une
aventure qu’on ne voit pas passer mais on n’en retient hélas pas grand-chose et
une fois l’expérience de cinéma passée on n’a pas forcément envie d’y revenir.
Le film fonctionne en surrégime constant dans les scènes d’action sans
gradation à l’échelle du film dans l’ampleur ni le spectaculaire. Une des
scènes les plus impressionnantes de Mad
Max : Fury Road, celle de la tempête teasée dans la bande-annonce, se
situe ainsi dans sa première moitié sans
que rien ne vienne ensuite lui faire ombrage. Malgré les bolides qui fusent à
cent à l’heure on ressent donc paradoxalement une légère impression de
statisme. Le film renouvelle en fait assez peu ses enjeux, et si on y regarde
de près se contente de recycler les éléments des précédents films de la saga.
Mais le plus gros défaut du film
reste ses antagonistes sous-développés. On comprend que George Miller et ses
co-auteurs privilégient les protagonistes qui bénéficient d’un meilleur
traitement, mais la bande de méchants semble susciter par leurs looks délurés
une série de promesses non réalisées. Immortan Joe est caricatural et ses
sbires sont inexistants. Ils suivent ainsi la tradition des antagonistes
sous-exploités de la saga “Mad Max”, auxquels seuls l’Entity du Dôme du tonnerre échappe un peu. Cette
troupe de gueules sorties tout droit de chez Leone ou Fellini n’est qu’une
surface, intriguante vue de loin mais sans aucune profondeur. Faire emmener
cette troupe par des tambours et un guitariste dont l’instrument crache du feu
fait sa petite impression, mais ce n’est au final qu’une pyrotechnie
cache-misère.
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