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Favori dans la course aux Oscars, The Revenant n’aura cependant pas décroché la statuette du meilleur
film, finalement décernée à Spotlight.
Ces récompenses peuvent évidemment toujours donner matière à débat, cependant la
victoire du passionnant métrage de Tom McCarthy est à mon sens amplement
méritée. Surtout que le dernier né d’Alejandro Iñarritu, s’il ne manque pas de
qualités, ne m’a pas franchement convaincu.
Nul doute que d’un point de vue technique The Revenant est une réussite éclatante, et les récompenses de la
meilleure mise en scène et de la meilleure photographie s’imposaient alors
naturellement. Cette maîtrise formelle du film est paradoxalement à la fois un
de ses atouts majeurs et son principal défaut. On retrouve cette caméra
virevoltante qui suit les personnages en plans séquences, déjà au cœur de Gravity et Birdman, lauréats aux Oscars du doublé meilleur réalisateur /
meilleure photographie en 2014 et 2015. Cette forme était un élément clef dans
l’expérience spatiale que proposait Alfonso Cuaròn, et pouvait se justifier
dans le précédent opus d’Iñarritu par son lien avec l’esthétique de la
représentation théâtrale.
Dans The Revenant,
l’enjeu est plutôt de faire ressentir au spectateur l’hostilité et la
sauvagerie de l’environnement dans lequel les protagonistes évoluent. Le film y
parvient par moments, notamment lors de l’attaque des trappeurs par les
amérindiens qui ouvre le film ; mais cette caméra omniprésente incarne
aussi la toute puissance d’un metteur en scène qui cherche parfois à en mettre
plein la vue assez vainement, comme lorsqu’il fait finir une course à cheval
par le plongeon d’une falaise.
Qu’apporte finalement The
Revenant du haut de ses deux heures trentre ? Pas grand chose du point
de vue d’un maigre récit qui, entre un premier acte assez réussi qui pose la
situation et une dernière partie plus dynamique, se contente de suivre la
longue errance de son protagoniste, entrecoupée de scènes avec le groupe qui l’
a abandonné que l’on aimerait plus développées. On comprend l’illustration de
la dureté de la vie et de la solitude des trappeurs, mais Iñarritu fournit trop
peu d’éléments pour qu’on s’intéresse véritablement au sort des personnages du
film. On en revient donc à la forme du film, et à y regarder de plus près tout
cela n’est pas follement original. Entre Terrence Malick, Andreï Tarkovski,
Werner Herzog ou les néo-westerns d’Eastwood, le réalisateur multiplie les
emprunts esthétiques sans jamais dépasser ses modèles. On ressort de The Revenant avec le sentiment d’avoir
vu l’œuvre d’un faiseur habile, très loin de l’émotion que pouvait susciter son
très personnel et atypique Biutiful.
Reste la question qui agite les nombreux fans de Leonardo DiCaprio : l'acteur a-t-il
obtenu sa récompense longtemps refusée pour sa meilleure prestation à ce jour ?
Si son engagement physique est à saluer, le caractère assez peu
travaillé du personnage qu’il incarne empêche d’atteindre l’enthousiasme que
pouvait susciter sa prestation hallucinante dans Le Loup de Wall Street. Pour
qui n’est pas sensible à la beauté très contemplative de The Revenant, à laquelle colle parfaitement la bande originale évanescente
de Ryuichi Sakamoto, le temps risque donc de paraître un peu long.
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