10 / Ce sentiment de l’été
Auteur discret, Mikhaël Hers a néanmoins fait preuve depuis une dizaine
d’années d’une rare sensibilité pour filmer les états d’âme. Avec Ce sentiment de l’été, son cinéma
intimiste prend une nouvelle ampleur en nous proposant de suivre ses
personnages sur trois étés et trois pays. Cette temporalité du récit permet au
réalisateur de traiter les thèmes du deuil et de la reconstruction avec une
justesse saisissante. Anders Danielsen Lie (vu dans Oslo, 31 aout) et Judith Chemla (une des grandes découvertes de
l’année, aussi à l’affiche d’Une vie)
incarnent avec finesse des protagonistes auxquels on s’attache comme rarement
au cinéma.
9 / Guibord s’en va-t-en guerre
Sorti sans grand bruit cet été, le film de Philippe Falardeau aurait mérité
bien plus d’attention. En marchant dans les pas de Frank Capra, le cinéaste
québécois signe une fable qui combine acuité satirique et profonde générosité.
Les tribulations d’un ancien joueur de hockey devenu politicien indépendant et
de son stagiaire haïtien ne manquent pas de fantaisie, mais posent surtout de
véritables questions sur le monde de la politique. Trépidante et engagée, cette
comédie savoureuse est le « feel good movie » de l’année.
8 / Victoria
Après un premier long métrage, La
bataille de Solférino, dont la forme brute évoquait John Cassavetes, on ne
s’attendait pas à ce que Justine Triet livre un film d’une telle classe
formelle. Victoria lorgne du côté de
la comédie sophistiquée à la Woody Allen ou Howard Hawks, mais dépasse au final
ces illustres influences pour se lover dans un spleen au charme tenace.
Portrait touchant d’une femme moderne et dynamique qui s’épuise à rechercher un
épanouissement professionnel et personnel, Victoria
est d’une contemporanéité remarquable. En état de grâce, Virginie Elfira est
d’une drôlerie irrésistible.
7 / Brooklyn Village
Les privilégiés de Cannes ont pu voir Après
le tempête de Hirokazu Koreeda en mai dernier, mais pour le commun des cinéphiles
il faudra attendre avril prochain pour découvrir cette nouvelle œuvre du plus
délicat des cinéastes contemporains. Heureusement, le bouleversant Brooklyn Village d’Ira Sachs nous a
permis de retrouver un peu de l’ambiance propre au cinéaste japonais. Dans un
New York ensoleillé, ce récit d’une amitié naissante entre deux adolescents qui
rencontre l’obstacle d’un conflit financier entre leurs deux familles propose
un regard à la fois tendre et lucide sur la liberté de l’enfance et les responsabilités
de l’âge adulte. Sachs se garde bien de donner raison à l’un ou à l’autre de
ses personnages, et ils en gagnent une complexité et une profonde humanité.
Cette pépite douce amère, servie par un casting d’exception, saura émouvoir
parents comme enfants.
6 / Baccalauréat
6 / Baccalauréat
Récompensé en 2007 de la Palme d’Or pour 4 mois, 3 semaines, 2 jours, le roumain Cristian Mungiu aura du
cette année se contenter d’un prix de la mise en scène partagé avec Olivier
Assayas. Baccalauréat aurait tout
aussi bien pu recevoir une distinction pour son scénario, tant le sujet et la
forme du film sont complémentaires pour donner une des expériences
cinématographiques les plus prenantes de l’année. Savamment construit, ce drame
psychologique se regarde comme un film policier aux retournements de situation
multiples, avec un véritable suspens quant à l’issue du récit. Tableau sans
concession de la société roumaine mais aussi réflexion plus large sur les relations
entre parents et enfants, Baccalauréat offre
une richesse thématique admirable sans jamais perdre de sa tension dramatique.
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