25/01/2014

2013 en 10 films (5-1)

5- Wadjda


Premier film tourné en Arabie Saoudite, Wadjda dépeint une société aux mains d’hommes qui ne laissent que peu de libertés d’expression aux femmes ; sa réalisatrice, Haifaa Al Mansour, a du ainsi en diriger les scènes d’extérieur à distance, dissimulée dans une camionnette. Mais il serait réducteur de limiter ce métrage attachant à un simple pamphlet, pour indispensable qu’il soit : d’abord parce que loin de tout manichéisme, le film décrit avec une grande finesse les rapports homme / femme dans l’Arabie Saoudite ; et surtout parce que Wadjda nous touche en contant l’aventure ordinaire d’une enfant pas si éloignée de nous qui rêve juste de pouvoir s’acheter une bicyclette comme les garçons.

Points forts : un message d’espoir magnifique sur l’indépendance à venir de femmes opprimées, la plus belle séquence finale de l’année


4- Le Congrès


5 ans après Valse avec Bashir, étonnant dessin animé documentaire, Ari Folman est revenu cette année avec un métrage à la forme tout aussi originale et passionnante. Film live puis dessin animé aux couleurs chatoyantes, Le Congrès gagne sur les deux tableaux, proposant un univers de science-fiction fascinant où les acteurs de cinéma vendent leur image de façon irrémédiable. A-t-on encore besoin des interprètes (souvent bien trop payés, comme l’a si bien fait remarquer Vincent Maraval)? Le retour éblouissant de Robin Wright dans un premier rôle est-il le chant du cygne d’une race en voie de disparition? Peu probable, et tant mieux, tant la force émotionnelle du Congrés repose sur son actrice principale.

Points forts : deux scènes d’une beauté bouleversante : une où Robin Wright montre toute la palette de son expressivité avant d’être absorbée par l’obscurité, et la renaissance finale où l’actrice choisit enfin sa place


3- Snowpiercer : le Transperceneige


J’attendais avec une appréhension les films des génies coréens Park Chan Wok et Bong Joon Ho. Si le premier s’est fait mettre sous cloche par Hollywood, comme le suggère le générique de son Stoker brillant par intermittences et finalement assez ennuyeux,  le deuxième se sort avec les honneurs de l’exercice périlleux du film au casting international. Snowpiercer bénéficie d’une mise en scène inventive, d’une interprétation exemplaire (Song Kang-Ho toujours phénoménal, Chris Evans intense, John Hurt impérial, Tilda Swinton géniale dans le grotesque) et d’un rythme effréné. Petit bémol : si le film explore avec délectation les zones d’ombre d’un scénario post-apocalyptique et fait preuve d’une énergie sauvage renversante, le retour relatif à l’ordre lors de la dernière partie, pas mauvaise mais trop explicative, est décevant. 

Point fort : la confrontation du groupe d’insurgés avec des hommes cagoulés, mise en scène avec une inventivité bluffante


2- Blue Jasmine


A force de proposer imperturbablement un film par an, Woody Allen peut provoquer une lassitude, et ses dernières réussites tenaient de la balade agréable (en Espagne pour Vicky Christina Barcelona, dans Paris et le passé pour Minuit à Paris), loin du niveau d’accomplissement de ses chefs d’oeuvre polyphoniques et ambitieux des années 80 (Hannah et ses soeurs ou Crimes et délits). Diamant noir, Blue Jasmine est un véritable retour en force de son auteur, assisté par une Cate Blanchett extraordinaire qui mérite toutes les récompenses. Ce qui fait aussi le prix de cette comédie d’une férocité réjouissante, c’est la lucidité de Woody Allen qui nous dévoile ce qui sous-tend la logorrhée inépuisable  qui caractérise nombre des personnages qu’il a incarné : la folie.

Point fort : l’explosion désespérée de l’héroïne incarnée par Blanchett confrontée au départ son mari, une scène d’une intensité émotionnelle rare chez Woody Allen


1- Cloud Atlas


On n’attendait plus grand chose des Wachowski, et voilà qu’accompagnés de Tom Tykwer  ils livrent le film le plus stimulant de l’année, une oeuvre somme à l’image du roman dont elle est adaptée. Film en costumes, drame, comédie, thriller, film de science-fiction, Cloud Atlas est tout cela à la fois, mêlant miraculeusement une multitude de récits dans un ensemble esthétique cohérent, au moyen de montages parallèles qui relèvent de la prouesse. Le message final a beau être un peu convenu, le plaisir ludique procuré au spectateur par ce film total tient à sa folle ambition et à l’enthousiasme communicatif des acteurs (Tom Hanks avec son accent cockney est un sommet comique). Osant le kitsch et un mélange des genres jubilatoire, Cloud Atlas a l’étoffe des films culte dont on pardonne tous les défauts.

Point fort : difficile d’extraire un récit de cette symphonie époustouflante, mais ma préférence va à celui mettant en scène le compositeur du Cloud Atlas Sextet

1 commentaire:

  1. Et mon top 10 de l'année :

    10 - No
    9 - Mobius
    8 - Insaisissables
    7 - Django Unchained
    6 - Hunger Games
    5 - Malavita
    4 - Le loup de Wall Street
    3 - Gravity
    2 - Capitaine Phillips
    And the winner is :
    ?????????????????????????????????????????????????????????????????????
    1 - L'extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet

    Et Juste par méchanceté durant cette année bien trop pauvre en nanard, la palme du plus mauvais film à :
    ∞ - Grand Central

    Gravity est une réelle claque visuelle, à la réalisation incroyable, au scénario d'une très grande justesse scientifique (mis à part Clooney qui s'éloigne en lachant la main alors qu'il a la même inertie que Sandra Bullock, oui je sais je peux être très chiant).

    Capitaine Phillips est l'histoire vraie de la prise d'otage d'un capitaine de porte-conteneur américain par des pirates somaliens. C'est un film incroyable qui maintient véritablement le spectateur dans une grande tension tout au long du film malgré que l'on attende une fin heureuse. Le film est extrêmement proche des faits historiques, cela devient trop rare chez les américains qui veulent souvent trop romancer leurs films historiques. Enfin c'est un film qui ne tombe pas trop dans le manichéisme des méchant pirates pour pouvoir approfondir l'étude du fonctionnement des mafias somaliennes et du désœuvrement des pirates contraints à toutes les folies pour survivre.

    Enfin T.S. Spivet est encore une merveille visuelle à la hauteur de l'immense Jean-Pierre Jeunet. Un nouveau conte d'une grande poésie qui vous porte, vous fait rêver durant tout le film tout en poussant la réflexion sur la société et le fonctionnement de la famille.

    Tout ça pour dire que l'extravagant voyage cinématographique de 2013 fut une vraie Happiness therapy, une année mêlant la mauvaise vie des misérables loups de Wall Street à la cravate de sang, à celle d'un capitaine insaisissable en gravité, ou celle d'un magnifique majordome solitaire en plein casse-tête chinois. Cette année c'était du Renoir, alors je ne dis pas No mais Si.

    Olivier

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