3,5 / 5
Comment
faire suite au succès retentissant d’Intouchables,
aussi bien en France qu’à l’étranger ? Avec Samba, Eric Tolédano et
Olivier Nakache répondent d’une façon idéale, en faisant une proposition à même
de satisfaire le public qui avait été séduit par leur précédent film tout en
évitant le risque de la redite. En adaptant le roman de Delphine Coulin Samba pour la France, les cinéastes
choisissent une nouvelle fois le terrain de la comédie sociale. Le choix d’introduire
le personnage d’Alice (Charlotte Gainsbourg) absent de l’œuvre d’origine permet
en outre de reproduire la formule narrative d’Intouchables, à savoir le rapprochement de deux individus en dépit
de leurs différences de statut. Lors de son premier jour de travail dans une
association qui vient en aide aux sans-papiers, Alice rencontre donc Samba
(Omar Sy) qui risque l’exclusion du territoire français.
L’intelligence
de Nakache et Tolédano est de retarder le développement de la relation qui se
noue entre les deux protagonistes de Samba,
évitant ainsi l’écueil du remake mal déguisé d’Intouchables. On suit donc d’abord séparément Samba
« emprisonné » dans un camp de sans-papiers et Alice qui se
familiarise avec sa tâche de bénévole. Les cinéastes savent trouver le ton
juste dans cette première partie et font preuve d’avantage de finesse
d’écriture que dans Intouchables qui
alternait parfois machinalement scènes dramatiques et vannes d’Omar Sy. La
description du quotidien des bénévoles parvient ainsi à incorporer de l’humour
à partir d’une situation dramatique, en jouant de la barrière de la langue dans
les échanges avec les sans-papiers. De façon globale, le récit des déconvenues
possibles des immigrés donne au métrage une authenticité qui le rapproche du documentaire
social, et une telle ambition dans un film destiné au grand public ne peut être
que saluée.
Si Samba propose un récit plus ambitieux que
Intouchables, il y perd un peu de
l’efficacité de son prédécesseur. On peut discuter de l’utilité narrative des
seconds rôles incarnés par Tahar Rahim et
Izïa Higelin, contrepoint assez faible au couple formé par Alice et Samba. Mais cette
impression tient aussi à l’interprétation irréprochable du duo d’acteurs
principaux. Charlotte Gainsbourg, toute en grâce fragile et en maladresses,
provoque l’empathie immédiate du spectateur. Quant à Omar Sy, il livre une
composition plus que convaincante dans
un registre à l’opposé du Driss extraverti et charmeur de Intouchables qui lui avait valu le César du meilleur acteur.
Véritable rôle de la maturité, le sénégalais Samba permet à l’acteur de prouver
qu’il est plus qu’un comique sympathique
au rire communicatif.
Au-delà
de sa tonalité qui mêle habilement éléments comiques et dramatiques, la
réussite de Samba tient, comme pour Intouchables, à une réalisation soignée
qui change de la mise en scène plate plate et approximative de comédies à
succès telles que Qu’est-ce qu’on a fait
au Bon Dieu ? Certes le plan séquence d’ouverture qui passe du
spectacle d’une salle de cabaret à la plonge en cuisine a quelque chose d’un
peu démonstratif et tape-à-l’œil, mais malgré quelques effets inutiles le
métrage possède une élégance indéniable. La meilleure illustration de cette
esthétique soignée est sa bande originale. Les morceaux de Ludovico Einaudi,
déjà compositeur sur Intouchable,
accompagnent avec délicatesse le désarroi social ou affectif de Samba et
Alice.
Cependant le sommet formel de Samba reste une belle séquence qui annonce le rapprochement imminent des
deux protagonistes au son de « To Know You Is To Love You» de Syreeta et
Stevie Wonder. C’est la nuit : Alice seule dans son appartement pense à
Samba, tandis que ce dernier gardien de nuit arpente les couloirs d’un couloir
d’un centre commercial vide. Puis il se
met à jouer avec les éléments du décor, à danser sur la musique extérieure au
récit dans un élan d’euphorie. On pense alors au Chaplin des Temps Modernes, gardien de nuit glissant
sur ses patins à roulettes. Parce qu’il retrouve par moments ce charme là, on
souhaite à Samba un succès à la
hauteur de celui d’Intouchables.
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